Il y a 200 ans, Napoléon Bonaparte mourait en exil à Saint-Hélène. Les commémorations de la mort de l’Empereur devraient être l’occasion d’une union nationale dans un pays normal n’ayant pas honte de son Histoire. C’était sans compter sur les habituels fossoyeurs de la France qui ne loupent jamais une occasion de polémiquer. Pourtant, pour paraphraser Clémenceau qui parlait de la Révolution, l’Histoire de France est un bloc, que ça leur plaise ou non.

 

Napoléon victime de la « cancel culture »

Le citoyen du XXIe siècle est sommé par les gardiens de l’ordre moral de ne retenir de Napoléon que le rétablissement de l’esclavage en 1802. Commémorer le souvenir de Bonaparte serait donc « un crime » pour Louis Georges Tin, président « d’honneur » du Cran, le Conseil représentatif des associations noires de France. La politologue Françoise Vergès y voit « une nostalgie déplacée de la grandeur passée de la France ». Quant à l’ancien président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré, il a déclaré que célébrer Napoléon à l’échelle de l’État constituerait une « provocation ». Des arguments pétris d’une habituelle malhonnêteté intellectuelle, avec lesquels l’on juge des faits passés avec le recul et le jugement moral de notre époque. Oubliés, le contexte historique ainsi que les considérations d’ordre public et de géopolitique qui ont poussé à prendre cette – malheureuse –  décision. Et tant pis si Napoléon Ier abolit la traite des noirs avec un décret du 29 mars 1815.

 

Un homme trop grand pour ceux qui ruinent la France

Le souvenir de Napoléon contraste effectivement avec la médiocrité à laquelle nous a habitués la classe dirigeante qui ruine la France depuis 50 ans… Un destin hors-norme forgé à la seule force de la volonté, une autorité incontestée, des victoires glorieuses… Tout le contraire de ce que nous vivons aujourd’hui, où l’antimilitarisme, l’égalitarisme, le consensus permanent et l’absence de hiérarchie sont devenus la norme. Les dirigeants actuels en sont conscients. Voilà des années qu’ils se sont soumis à l’esprit de repentance et à l’auto-flagellation. L’apprentissage de notre roman national est abandonné depuis longtemps. Permettre aux Français de rêver de grandeur devant notre glorieuse Histoire de France est devenu inconcevable. Un exemple parmi tant d’autres : Chirac avait boudé la commémoration de la victoire d’Austerlitz mais avait envoyé le Charles de Gaulle pour le souvenir de Trafalgar. Seule la culture de la défaite est de mise.

 

Un héritage immense

« Ma vraie gloire n’est pas d’avoir gagné 40 batailles. Waterloo effacera le souvenir de tant de victoires. Ce que rien n’effacera, ce qui vivra éternellement, c’est mon Code civil », dixit Napoléon. A raison d’ailleurs, la moitié des articles d’origine étant encore en vigueur. Mais Napoléon, ce n’est pas que cela. C’est aussi une organisation territoriale et une administration nationale solide : des préfectures, des départements, des cantons, la Banque de France… Sans cette reprise en main énergique, la Nation n’aurait sans doute pas survécu au chaos de la Terreur. Rappelons aussi en vrac l’instauration du baccalauréat et de la Légion d’honneur, malheureusement tous deux bradés depuis longtemps. L’époque napoléonienne, ce sont aussi des monuments parisiens qui nous rappellent notre grandeur passée : l’Arc de Triomphe, le petit Carrousel du Louvre, le palais Brongniard qui a abrité la Bourse de Paris, l’église de la Madeleine. Sans oublier les Invalides où il repose aujourd’hui. En dehors de la capitale, des dizaines de monuments, statues, et bâtiments de l’époque impériale perpétuent le souvenir de l’Empereur. Cet héritage n’est évidemment pas exhaustif. Et ceux qui nous gouvernent seraient bien avisés de le maintenir en l’état, à défaut d’en faire au moins le dixième.

Je ne suis pas un inconditionnel de Napoléon et j’ai des critiques à formuler à son encontre. Mais Napoléon a été l’Empereur, le grand homme, celui dont l’influence a été immense ; il est le Français le plus connu au monde depuis 200 ans et tous les pays rêveraient de pouvoir compter, dans leur propre panthéon, un astre de cette importance. Alors face à cela, mon avis ne pèse rien, mes critiques ne rivalisent pas. Je continue de les avoir et de les proposer à la discussion entre Français curieux, mais lorsqu’arrive le moment où la Nation doit commémorer son grand homme, je commémore avec elle et je m’incline devant ce professeur d’énergie.

Louis Picq

Louis Picq

Etudiant en journalisme